Si l’on connaît bien l’adage selon lequel les personnes drôles cachent souvent en eux une grande tristesse, on oublie parfois que cela a une conséquence dramatique : les vrais génies comiques ont des tendances dépressives suicidaires. Et c’est le cas, ou ça l’a été, de Bill Murray, clown triste du cinéma américain devenu la coqueluche du cinéma indépendant US au tournant de l’An 2000 après avoir ravi le grand public avec S.O.S. Fantômes ou Un Jour sans Fin.
Comme souvent avec la collection Capricci Stories, le livre très court laisse à la fois un goût de trop peu, mais aussi une envie de dévorer la filmographie du sujet évoqué. Ici le journaliste Yal Sadat (France Culture, Première, Chronic’art…) a la bonne idée de revenir sur les débuts, moins connus en France, du grand Bill : sa jeunesse catholique dans un grande fratrie (plusieurs de ses frères sont également acteurs), ses premières armes sur les planches et à la radio et son départ un peu chaotique dans la fameuse émission Saturday Night Live, vivier de talents comiques américains depuis près de 50 ans.
C’est justement à ses débuts, alors que la gloire frappait à sa porte, que Bill Murray a eu le plus tendance à la dépression, suite à des projets peut-être bancals mais passionnant et personnels comme Where the Buffalo Roam et Le Fil du Rasoir, entre deux tonitruants cartons dans des comédies loufoques ou des chasses au fantômes très cinégéniques.
Toujours le cul entre deux chaises, il s’est vite retiré des affaires mondaines (il n’a pas d’agent, mais un répondeur qui enregistre les propositions de films et qu’il écoute sporadiquement) pour mieux se concentrer sur une recherche de lui-même, de son Bill intérieur. Commencez Sans Moi revient donc sur la création de la “Légende de Bill Murray” selon laquelle il peut apparaître partout à l’improviste dans le quotidien des gens normaux, le long de savoureuses histoires véridiques et qui semblent avoir donné un vrai sens à sa vie. Preuve à l’appui, ces jours du printemps 2019 passés à Nantes et alentour, entre dégustation publique de glaces dans le centre-ville et auto-invitation à une fête d’anniversaire dans le vignoble du Muscadet, toujours l’objet d’articles hallucinés dans la presse locale.
Peut-être que son but ultime est désormais de réussir à fournir une anecdote mémorable à chaque habitant de cette planète et on l’en remercie car le monde est, grâce à lui, un peu plus beau.
Bill Murray, commencez sans moi, de Yal Sadat, édité par Capricci, 11,50 €.
Disponible ici.