Chants exotiques inspirés des bruits de la forêt et cocons en bois, Amazonie nous plonge dans l’univers tropical de l’Amérique du Sud. Présentant des armes empoisonnées, couronnes plumées, psychotropes et images d’archive, l’exposition invoque l’équilibre du monde selon les locaux d’Amazonie. Le chamane, prophète de l’exposition, fait le lien spirituel entre tous les vivants et objets terrestres : tous sont égaux, sans distinction, et communiquent entre eux. Loin des cannibales sauvages longtemps décrits par des anthropologues prônant la hiérarchie culturelle, les communautés Bororo, Tukano ou encore Wayana restent pacifiques via leur perspectivisme, à savoir leur capacité à se mettre à la place d’autrui. Une belle histoire donc ? Oui, si on ne remue pas trop le passé et le présent. Après cinq siècles d’ethnocide, d’abord par les colons espagnols et portugais puis par les producteurs de caoutchouc et les exploitants de la forêt – porteurs de maladies mortelles – 80% des populations amérindiennes ont disparu. Des ravages historiques, politiques et économiques que dénonce la ville de Nantes dans sa démarche de « décolonisation de la pensée ». Un écosystème isolé et fragile à protéger à l’heure où le président Brésilien Jair Bolsonaro, grand démocrate, déclare : « Pas un centimètre ne sera démarqué en tant que réserve autochtone ». Un constat pessimiste pour des populations envahies mais riches de savoirs, valeurs et dialectes : d’après Almir Narayamoga, chef indien d’Amazonie, « J’ai pensé que Google Earth pourrait être un formidable outil pour surveiller notre forêt. Ils avaient toutefois fait abstraction d’une chose essentielle : notre existence ».
EMMA RODOT
Château des Ducs de Bretagne (Nantes – 44) du mardi au dimanche du 15/06 au 19/01
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