« Daft Punk : 1993-2021 ». RIP ! Nous n’avions pas vu ça depuis… François Hollande. On avait perdu l’habitude, mais nous sommes bien là face à une fin. Au moment de la rédaction de cet article, la vidéo Epilogue a été visionnée plus de 18 millions de fois sur YouTube. En quelques minutes, Thomas Bangalter et Guy-manuel de Homem-Christo annoncent leur souhait définitif de s’affirmer individuellement après 28 ans de carrière en duo.
Qui n’a pas fait le robot sur Around The World ou Harder Better Faster pour impressionner cette personne si particulière dans une boum arrosée au Passoã ? La période de vide culturel que nous traversons est propice à la nostalgie. Il faut dire aussi que nous avons perdu l’habitude des adieux. Si les reboot, comeback et autres revival ont toujours fait partie de l’industrie du divertissement, les 20 dernières années ont été très généreuses en la matière. Certains diront même avec un brin d’ironie que « le revival des années 80 a duré plus longtemps que les années 80 » !
La norme veut que si un concept fonctionne, il faut le rentabiliser jusqu’à l’écœurement. On perd peu à peu cette sensation un peu masochiste que l’on ressent quand on regarde le dernier épisode d’une ex-bonne série, quand on écoute le dernier album d’un groupe en pilote automatique qui pourtant nous a fait rêver… Certes, des exceptions existent (le réalisateur Robert Zemeckis s’est assuré que l’on ne touche jamais à Retour vers le Futur, le bedéaste Bill Watterson a mis fin à sa série Calvin & Hobbes etc.) mais restent isolées. Le traitement de la saga Star Wars par Disney est assez représentatif de cet état de fait, quelques années de surexploitation auront réussi à torpiller tout le potentiel émotionnel de cet univers. Quant à The Walking Dead, elle n’a jamais aussi bien porté son nom.
La faute à l’argent roi ? Probablement. Mais aussi notre faute à nous. Il serait facile de renoncer à acheter cet énième album peu inspiré d’un groupe qu’on adorait, si facile de s’épargner le visionnage d’un opus sans âme d’une saga culte de notre enfance. Mais voilà, comme l’ont pointé les malicieux créateurs de South Park avec le concept des Member Berries, nous sommes prompts à nous à nous ruer dans des promesses de sensations retrouvées, tout en sachant au fond de nous que la saveur n’en sera plus la même. Dès lors, la lassitude semble être la seule issue possible.
Ce postulat peu engageant, Daft Punk lui tourne le dos. Si la fin est inéluctable, on peut néanmoins s’offrir le luxe de la choisir. En tirant leur révérence sans fausses notes à leur actif, les deux compères quittent la scène têtes hautes, avec la créativité et l’élégance qu’on leur a toujours connue. Sans tournée d’adieu, ni dernier album, juste une fin. L’histoire se termine, la légende commence et l’émotion reste intacte.