Existe-t-il chose plus emblématique de la pop culture que la figure du zombie ? Depuis qu’il a été popularisé par Georges Romero dans le cultissime La Nuit des Morts-vivants (1968), il a grignoté l’ensemble du paysage médiatique. Il nous fait danser dans le clip Thriller de Michael Jackson, nous amuse dans Bienvenue à Zombieland (2009), nous donne du fil à retordre dans les jeux Resident Evil, et nous endort un peu dans la série The Walking Dead… Par opposition à l’antagoniste charismatique, le zombie se caractérise par son absence d’identité ou de but. Il symbolise tant notre fin inéluctable que le pouvoir destructeur des masses. Il est froid, hypnotique, duplicable à l’infini… Un peu comme les toiles d’un certain Andy Warhol. Et lorsqu’Hollywood découvre une recette qui marche, elle la ressert jusqu’à écœurement. Alors, quand Jim Jarmusch (Stranger Than Paradise, Dead Man, Ghost Dog, Only Lovers Left Alive…) s’essaye à l’exercice, on se demande si ce n’est pas le film de trop. On découvre Centerville, bourgade américaine, avec ses personnages caricaturaux, de la serveuse de drive-in indiscrète au fermier raciste. Ce petit monde est sous l’autorité du chef Cliff (Bill Murray) et de son adjoint Ronnie (Adam Driver). Deux flics pantouflards, totalement dépourvus face à l’invasion d’une horde de zombies… Disons-le tout de suite : The Dead don’t Die est une farce assumée. Esthétique kitsch, situations loufoques, clins d’œil intempestifs, le cinéaste ne se prend pas au sérieux, se payant même le luxe de briser le 4ème mur. Le casting est somptueux (Tilda Swinton, Steve Buscemi…) l’ambiance à la Twin Peaks est réussie et les situations sont souvent très drôles. Alors que manque-t-il pour faire un carton plein ? On serait tenté de dire : la surprise. Quand un réalisateur tel que Jarmusch s’approprie le film de zombie, on veut le découvrir sous un jour différent. Il n’en est rien. L’Américain se borne à coupler l’humour grinçant de Shaun of the Dead (2004) et le discours acerbe des « Pères fondateurs » que sont Romero et Carpenter. Efficace, mais sans plus, dommage…
AXEL KRIEF