En 1995, le réalisateur Gus Van Sant sort d’Even Cowgirls get the Blues, un désastre cinématographique qui met à mal son statut de golden boy du ciné indé US, obtenu grâce à des films marquants (Drugstore Cowboys et son chef-d’œuvre My Own Private Idaho). Il accepte alors son premier film de commande : Prête à Tout, une satire de l’obsession américaine pour la célébrité et la télévision, adapté d’un livre de Joyce Maynard inspiré lui-même d’un fait divers tragique largement médiatisé aux États-Unis. Sur un scénario de Buck Henry (Le Lauréat, Taking Off),
Prête à Tout relate le destin d’une jeune femme qui rêve de devenir une grande journaliste et qui est, pour cela, et bien prête à tout.
Le film déroule un boulevard pour le talent de Nicole Kidman jusqu’ici plus connue pour des rôles de belles jeunes femmes dans des films sans importance et surtout, pour le rôle un peu réducteur de Mme Tom Cruise à la ville. Elle crève ici littéralement l’écran avec une composition inédite qui rappelle les grands rôles féminins de l’Age d’Or d’Hollywood. On pense forcément aux femmes fatales de Boulevard du Crépuscule ou Eve, mais aussi au timing comique des actrices de la « screwball comedy » comme Rosalind Russel dans La Dame du Vendredi. Kidman est ici flamboyante en monstre manipulateur sous des dehors de poupée Barbie, un véritable tour-de-force où elle allie l’intelligence reptilienne de son personnage avec son inculture grasse. On ne peut d’ailleurs que regretter, qu’à part dans de rares occasions, on n’ait pas tellement revu ce talent depuis…
Elle est par ailleurs entourée d’un casting en or massif qui lui fait la place tout en étant formidable : Matt Dillon en mari gentil et dépassé, Illeana Douglas en belle-sœur sympathique et clairvoyante, Dan Hedaya, Kurtwood Smith, ainsi que des caméos efficaces de George Segal et David Cronenberg. On remarque aussi, et surtout, deux jeunes acteurs prometteurs, Casey Affleck et Joaquin Phoenix dans son premier rôle d’envergure, plus que convaincant en ado paumé, victime consentante des griffes de la vamp Kidman. On note également la musique de Danny Elfman, qui tend vers ses compositions pour les premiers films de Tim Burton et, grâce à ses accents presque féeriques, porte le film vers le conte.
Enfin, redécouvrir ce film en qualité BluRay permet de le voir tel qu’on devrait le considérer vraiment : un classique du cinéma américain.
Prête à Tout, de Gus Van Sant, édité en BluRay par Elephant Films, 19,90€, disponible