Après une tournée affichant complet suite au succès de Hit Sale, un premier album certifié Platine, Thérapie Taxi revient avec Cadavre Exquis et entame l’année 2020 avec un tour des Zénith de France. Entretien avec Raphaël Faget-Zaoui, tête pensante du dorénavant quintet.
Hit Sale a fini Disque de Platine, ressentiez-vous plus de pression lors de la production de ce deuxième disque que sur le 1er album ?
Moins ! Bien sûr, la pression est là, mais si tu te plantes sur un premier album, la maison de disque ne te donne pas une autre chance. Aujourd’hui, on sait qu’on a « percé le game » et que des gens nous suivent. Même s’ils n’aiment pas le nouvel album, je me dis qu’ils jetteront au moins une oreille sur le troisième.
Cadavre Exquis est un album plus riche que le précédent, pourtant vous l’avez rapidement produit…
C’est un disque composé lorsque nous étions encore en tournée. C’était le bon timing pour le sortir dans la foulée du succès de Hit Sale, mais on manque un peu de recul dessus. Peut-être qu’on aurait dû enlever certains titres pour en mettre certains en avant. De toute manière, je reste un peu nostalgique de l’époque folle et effervescente du premier album. Aujourd’hui, tout le groupe est plus posé, Adélaïde ne boit plus depuis huit mois, il n’y a plus que moi qui fait encore beaucoup la fête.
Ce thème revient énormément sur vos disques, est-ce un sujet inépuisable ?
Oui, la nuit est une zone d’intensité ! J’aime les rencontres, les cassures et je ne trouve cette énergie que dans la nuit. C’est peut-être aussi l’image que j’ai d’un artiste.
Vos textes sont crus et parfois à prendre au second degré, le public le comprend-il ?
Évidemment, avec une chanson comme Salope, on s’en est pris plein la tête ! On vit aujourd’hui dans une époque qui ne comprend pas toujours la provocation et l’humour. Il faudrait un panneau « WARNING » dès qu’on parle en public, car l’individualisme rampant et les sensibilités de chacun deviennent aujourd’hui intouchables. J’ai un discours de boomer, je sais (rires).
Vous n’êtes pourtant même pas trentenaires (rires)…
Attention, je me sens complètement en phase avec ma génération et ses valeurs, mais je deviens intolérant envers ceux qui n’ont pas d’humour. Pour résumer, je crois seulement que certains sujets sont plutôt à évoquer en privé à l’occasion d’une vraie conversation et d’un réel échange. J’ai beaucoup plus compris le féminisme en discutant avec des amies qu’avec n’importe quelle idiote de Twitter qui veut juste montrer qu’elle appartient au camp du « Bien ». Pour autant, Thérapie Taxi a une audience large, il est important pour nous d’affirmer certaines convictions comme l’écologie, même si on est tous paradoxaux sur ce sujet.
Peut-on vivre à 100% selon ses convictions ?
J’ai essayé de vivre six mois sans smartphone, j’étais malheureux. Il faudra des années pour sortir du confort inédit que l’on possède aujourd’hui. Il est primordial de mettre du sens dans sa vie, mais en ne vivant que selon tes convictions, tu peux facilement devenir ce relou qui fait la morale à tout le monde. Notre génération sait qu’elle est paradoxale, qu’elle défend l’écologie alors qu’elle prend beaucoup l’avion, qu’elle est collée à son portable et sur-connectée. Le problème, c’est qu’on nous le rappelle tout le temps ! Les générations précédentes ne l’étaient pas moins que nous. C’est une bonne excuse des politiques pour nous culpabiliser et ne rien changer, c’est pourtant leur travail !
Lorsqu’on a composé un tube comme la chanson Hit Sale (65 millions de vues sur Youtube), est-il tentant de reproduire la formule pour la suite ?
Reproduire ce succès est impossible. Hit Sale, c’est notre « gold » qui restera, comme Dernière Danse de Kyo ou La Boulette de Diam’s (rires) et ça nous va très bien ! Aujourd’hui, ce titre est plus connu que le groupe, mais on arrive à s’en affranchir avec le live où l’on se crée une autre réputation.
Le succès fait-il changer ?
Forcément, mais je trouve qu’on a bien géré, c’est l’avantage d’être en groupe comparé à un artiste solo où toute l’attention et la pression sont sur toi. On se ramène sur Terre les uns les autres. Mais c’est parfois étrange… Il y a peu de temps, je passais pour ce paumé de 24 ans, pion dans un collège et qui rêve d’un grand succès qui n’arrivera jamais. Aujourd’hui, pour les mêmes personnes, je passe pour ce gars courageux qui a été au bout de ses rêves. Pourtant, je suis la même personne, j’avais déjà composé Hit Sale quand je galérais.
Regrettez-vous parfois cette période ?
J’ai toujours voulu la reconnaissance, elle ne m’est pas tombée dessus par hasard. Sinon, il ne faut pas faire ce métier… Le défi, c’est de ne pas devenir un connard ou de commencer à donner des leçons de vie aux potes etc. C’est plus dur qu’il n’y paraît (rires).
En concert au Zénith de Nantes (Saint-Herblain – 44), le 1er avril à 20h, 35 à 40 euros.