Au début des années 90, les époux Crain et leurs cinq enfants ont vécu des événements traumatisants au manoir de Hill House, aujourd’hui notoirement reconnu comme hanté. Adultes, les membres de la fratrie essaient, chacun à leur façon, de mener une vie normale, mais la bâtisse labyrinthique va cruellement se rappeler à leur souvenir. The Haunting of Hill House est une énième adaptation d’un roman archi-culte de Shirley Jackson, publié en 1959. Le livre est notamment à l’origine du très bon La maison du diable (1963) et du très mauvais Hantise (1999). La série de Mike Flanagan relève donc un défi de taille, celui de réinventer un poncif fantastique quasiment aussi vieux que le genre lui-même : celui de la maison hantée. Une généreuse distribution de claques virulentes étaient donc à craindre du côté de la critique, et pourtant, grâce à des choix audacieux, la magie opère. Un des premiers coup de génie de la narration est de se scinder en deux époques bien distinctes qui ne cessent de se croiser, celle de l’enfance, et celle de l’âge adulte, ce qui donne une profondeur toute particulière aux personnages. De même, la réalisation fait l’économie des effets gores gratuits et autres jump scares qui gangrènent le genre depuis des années, pour s’orienter vers une angoisse beaucoup plus subtile, presque suggérée, mais diablement efficace. Des figures fantomatiques ont ainsi été « camouflées » dans l’image au fil des épisodes, mais seul un oeil avisé les repérera. Mais le vrai coup de génie de Flanagan est de détourner l’objet même du propos, bien plus que de spectres, il est ici question de famille, et de tout ce que cela implique : mémoire commune, non-dits, éloignement, rupture, pardon … Une vraie bonne surprise télévisuelle, adoubée par le « King » Stephen himself, que vous faut-il de plus ?
AXEL KRIEF