Dico de la Cuite de Stéphane Pajot : ivre libre ou mourir
Imbibé, imprégné, éméché, empétoulé, bombardé, les yeux dans la graisse de bines, les paupières en peau de saucisson… Les mots ne manquent pas pour décrire nos états bien peu catholiques de certains soirs. Leur diversité et, osons-le, leur poésie, parlent aussi de notre relation à l’ivresse, quelque part entre fierté et honte, entre la gloire des princes et princesses de la cuite et le ridicule fini des vieilles arsouilles. Notre Stéphane Pajot national, journaliste, auteur et grand spécialiste de l’Histoire de Nantes, a donc eu la bonne idée de réunir en un Dico de la Cuite, toutes ces expressions chantantes, locales ou non. Le recueil est illustré de dessins d’antan et agrémenté d’anecdotes journalistiques où certaines personnes sont passées à la postérité, le temps d’une soirée si arrosée qu’elle a fait les gros titres. Idéal pour laisser autre chose à Noël dans les petits souliers de vos camarades de bitures que la traditionnelle queue de renard du réveillon.
ALEXIS THÉBAUDEAU
Édité par Goater, 14 euros
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Nicolas Cage, envers et contre tout
de Lelo Jimmy Batista : Cage doré
Nous vous en parlions il y a peu de temps pour le sortie du film PIG, Nicolas Cage a depuis longtemps dépassé le statut de star de cinéma pour entrer de plein pied dans la légende. Acteur versatile dès ses débuts sa carrière est émaillée de performances remarquables dans des films qui ne le sont pas moins. On l’a découvert en cartoon vivant chez les frères Coen dans Arizona Junior, en émule du King Elvis dans Sailor et Lula, en alcoolique convaincant dans Leaving Las Vegas, qui lui a valu son Oscar, ou encore en homme d’action dans Rock ou Volte-Face. Mais depuis 10 ans, Cage s’est éloigné d’Hollywood pour se tourner vers une carrière à part, constituée de films direct-to-video qui semblent exister dans l’unique but de payer ses impôts ou de projets de plus en plus étonnants, personnels et donc fous, comme l’incroyable Mandy ou l’étonnement subtil Mom and Dad. Ce départ, revendiqué, de la Mecque du Cinéma coïncide aussi avec une nouvelle vision de Cage par le public sidéré par ses performances à la limite de l’Art Contemporain, relayées dans d’innombrables « memes » Internet qui se moquent tout autant qu’ils célèbrent sa position unique dans le cinéma mondial. Mais le livre Nicolas Cage, envers et contre tout va plus loin et raconte à quel point l’acteur est toujours sincère dans ses rôles. Peu importe qu’il joue dans un peu recommandable film d’exploitation ou dans un futur film culte, Cage se donne à fond pour son art et pour son public. Décidément on ne mérite pas Nicolas Cage et l’ampleur ahurissante de son talent.
ALEXIS THÉBAUDEAU
édité par Capricci, 11,50€, disponible
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Alabama 1963
de Ludovic Manchette et Christian Niemiec : Louisiane solo
Pour le lieu et l’heure, tout est dans le titre. À Birmingham, une petite fille noire est retrouvée morte et les autorités locales ne sont pas bien motivées pour mener l’enquête. Laquelle incombera à Bud, flic déchu et alcoolique, et à Angela, femme de ménage afro-américaine officiant dans les riches demeures d’anciens planteurs. La rencontre de deux mondes, sur fond de lutte pour les droits civiques, pourrait vite tourner au pathos si on ne s’attachait pas illico à ces deux protagonistes aux caractères bien trempés. Le contexte de l’époque, extrêmement bien décrit, nous immerge dans l’ambiance crasseuse de cet état sudiste où persiste la ségrégation. On regrette un peu que le lecteur ne soit que l’observateur éloigné de l’enquête policière et que celle-ci manque parfois de détails et de consistance dans le récit. Le suspense reste léger mais néanmoins suffisant pour engloutir ce premier roman d’une traite.
SANDRINE CHOUZENOUX
édité par Le Cherche Midi, 18 euros
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Surnaturelles : une Histoire visuelle des femmes médiums de Philippe Baudoin : (her)etic
Le charlatanisme n’est pas l’apanage des hommes et, il y a un siècle et demi, des femmes mediums se sont lancées dans l’aventure du spiritisme et autres tours de tables volantes, souvent avec succès. Cette période coïncide avec les débuts de la photographie qui a donc été très vite utilisée pour documenter ces pratiques occultes voire pour tenter de les valider définitivement. Au fil des pages de Surnaturelles, beau livre de photos de cette époque, on découvre alors ces femmes en pleine communication avec l’Au-delà. Ces photos sont plus belles encore lorsqu’elles présentent les « apparitions », les faisant alors entrer dans le domaine du fantastique. Mais c’est la partie historique qui rend le tout réellement passionnant. En effet, le médiumnisme a été l’occasion pour les femmes du 19ème d’une certaine émancipation, mais de courte durée. Étudiées ensuite par des scientifiques bien de leur époque, ces femmes furent l’objet d’expériences pour tester la réalité de leurs pratiques, qui furent autant de prétexte pour réaffirmer la domination de ces messieurs, à l’aide d’instruments censés empêcher la triche mais ressemblant surtout à des engins de torture.
ALEXIS THÉBAUDEAU
éditions Pyramyd, 29 euros
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