Si on l’a connu en tant que chanteur de Rhum For Pauline et claviériste pour Pégase, c’est désormais en solo et sous le nom de Lenparrot que Romain Lallement perpétue une aventure musicale commencée depuis l’enfance. Avec sa présence scénique unique et And Then He, un premier album pop aussi sensuel que mélancolique, le Nantais d’1m94 à la voix grave nous parle de sa course en solitaire.
Ne parle-t-on que de soi lorsqu’on compose une chanson ?
Toujours de près ou de loin et c’est encore plus vrai quand on se lance dans une aventure solo comme l’est Lenparrot. En bande, c’est plus complexe. Avant, je ne me voyais pas imposer certaines paroles qui ne concernaient pas forcément les autres membres du groupe. Et j’ai du mal à faire des compromis et à ne pas avoir le dernier mot. Lenparrot me permet une introspection parfois hors-sujet. Je peux y aborder mon enfance, la sexualité, être dans la cathartie.
Celui que tu es sur scène ou en chanson est il la même personne que tu es au quotidien ?
C’est un mélange des deux ! Je suis d’un naturel plutôt jovial, plus le « rigolo de la bande » que celui qui ne parle pas au fond de la classe. Lenparrot reflète ce que je suis lorsque je suis face à moi-même. Je dévoile en musique ce que je ne peux dévoiler en société. C’est de l’ordre de la confession.
Tes paroles sont-elles 100% autobiographiques ?
Pas seulement, c’est pour ça que ça s’appelle Lenparrot et pas « Romain Lallement ». C’est déjà assez mégalo comme projet. Être artiste et chanteur demande un certain ego pour être honnête (rires). Mais la chanson est un terrain de jeu absolu, c’est la possibilité de se réinventer. Je peux habiter différents personnages, des hommes, des femmes, moi étant enfant ou un jardinier gay qui travaille dans un couvent ! Néanmoins, si Lenparrot était au départ un travestissement, je reviens de plus en plus vers moi, à ma voix naturelle (grave et non haut-perchée) et même vers la langue française.
La pression est-elle la même quand on est seul, comparée à ton expérience de groupe ?
Avant la sortie du disque, je suis passé par plein d’états : la panique, la fête à l’excès, des moments de déprime. J’ai aussi dû créer mon propre label pour le sortir, c’était un vrai travail d’artisan. Ce fut une libération quand il est paru. Ce qui m’a déstabilisé, c’est le côté fugace de la sortie après des mois et des mois de travail. Les premières semaines, l’album a reçu des critiques très positives, parfois même élogieuses et puis plus rien ! C’est le jeu, aujourd’hui… C’est pour ça que la scène est importante, pour continuer à faire vivre ces chansons. En revanche, être seul en concert demande d’être sincère, sinon ça ne marche pas. On ne peut pas se reposer sur les autres et être galvanisé par les membres de son groupe.
La composition en solitaire n’est-elle pas vertigineuse ?
Il y a évidemment des passages à vide. J’essaie parfois de me frustrer et de ne pas écrire de musique pendant un mois pour provoquer la nécessité d’aller à l’essentiel. D’ailleurs, je ne laisse quasiment pas de déchet. Si je commence un titre, je ne le lâche pas avant qu’il soit terminé.
Sans personne pour te conseiller, ce n’est pas tentant de re-travailler encore et encore une chanson à l’infini ?
J’ai la chance de ne pas être un geek et de de ne pas bien maîtriser les logiciels d’enregistrement (rires). J’aime être un néophyte. Si je maîtrisais, je risquerais effectivement de me perdre. Là, seul avec mon piano, je laisse place à la chanson et à la mélodie.
Quelle est ta définition d’une grande chanson pop ?
Ce n’est pas forcément une chanson facile, évidente ou une question de structure « couplet/refrain », c’est pour moi un morceau qui te met par terre ! Il faut qu’il n’y ait aucun filtre entre l’émotion et la mélodie, que tout soit au service de la chanson.
Interview réalisée par Pierre-François Caillaud